Giorgia Meloni répond aux opposants par le dialogue et non par des plaintes stériles
Sur le dossier Meloni-Canfora, actuellement dans tous les journaux, on lit surtout des positions claires, en faveur de l'un ou de l'autre : ceux de droite défendent le Premier ministre, ceux de gauche soutiennent Canfora. Ainsi, comme toujours, un sujet complexe et plein d’implications se réduit à une question d’équipes, comme s’il s’agissait d’établir qui est bon et qui est mauvais ; et comme s'il n'était pas possible qu'il y ait des torts des deux côtés. Commençons par les propos de l'historien et philologue, ensuite approfondis et justifiés dans un entretien accordé à la Presse : fondés certes sur une réflexion réfléchie (on parle d'un intellectuel de haut niveau, qui utilise rarement des termes aléatoires), mais aussi pas très précis et pas particulièrement utile pour la critique politique. Les analyses de Canfora sur la guerre en Ukraine ont d’ailleurs toujours été influencées par son cadre idéologique (ce qui ne devrait pas arriver à un historien). Affirmer que Giorgia Meloni est une néonazie parce qu’elle soutient l’Ukraine est assez risqué, et une descendance du MSI ne suffit pas à le justifier. L'explication apportée aujourd'hui, complétée d'une citation de Tocqueville sur les pulsions inconscientes, est très passionnante, mais même dans ce cas peu utile : lui seul la comprend.
L'élément de pouvoir
Laissons de côté les discussions sur la légitimité des critiques, qui surgissent à chaque fois que l'on parle d'un important procès en diffamation : celle-ci sera établie par le juge. Ce qui nous intéresse ici, c'est de considérer qui sont les personnes impliquées, car en avril 2022, lorsque Canfora a publié cette déclaration, Giorgia Meloni était députée et secrétaire d'un des principaux partis italiens : elle n'était pas une citoyenne commune. Moins que jamais maintenant qu’elle est devenue Première ministre. Or, dans les cas de diffamation, l'élément de pouvoir est très important : si moi qui vous critique (ou vous insulte, selon votre point de vue) j'ai plus de pouvoir que vous, le préjudice que je vous cause est grave. Toutefois, si vous en avez le pouvoir, les dégâts que vous subissez sont bien moindres. Autrement dit : le citoyen ordinaire diffamé, en plus de devoir débourser de l'argent qu'il n'a souvent pas, risque de ne pas voir son image publique réhabilitée. Le Premier ministre a à son service des dizaines de professionnels, payés spécifiquement pour redorer son image ; et il faut reconnaître qu'ils font un excellent travail. Il est peu probable qu’une personne comme Canfora, aussi estimée et respectée soit-elle, ait plus de pouvoir médiatique que Giorgia Meloni.
Le Premier ministre ne devrait pas faire taire ses opposants
Mais il ne s’agit pas tant de cela que du fait que Giorgia Meloni est la Première ministre : elle n’est pas simplement une personne de pouvoir, mais elle est une représentante des institutions, le chef du gouvernement. On ne peut manquer d'évaluer ce rôle dans l'analyse de la question : un homme politique, et en particulier un homme politique qui gouverne, a le devoir d'écouter les critiques des citoyens, aussi féroces et imprécises soient-elles, et d'y répondre : ne pas chercher à les faire taire et à les punir. parce qu'ils les ont déplacés. Critiquer le pouvoir doit toujours être possible, et ces plaintes (ce n'est pas la première, rappelons-le) marquent un chemin terrible pour le dialogue démocratique. En général, la plainte facile est un mal de cette époque, dans laquelle la susceptibilité de l'individu tend à prévaloir sur les analyses lucides, et l'incapacité d'accepter la critique se traduit par une dénonciation contre l'enseignant ; mais c'est particulièrement le cas lorsqu'elle émane d'acteurs politiques, précisément parce qu'elle jette les bases d'une limitation des critiques passionnées.
La politique à l’école : propagande ou éducation ?
Il convient également de s’intéresser brièvement à un autre aspect, celui de la politique à l’école. Le Premier ministre a déclaré que Canfora n'aurait pas dû faire de la « propagande » auprès des jeunes étudiants au lieu de s'occuper de culture. Peut-être que le Président ignore que Canfora a été invitée par le lycée Fermi pour parler de la guerre en Ukraine, ce qui est légitime et légitime pour une école : la politique ne peut pas rester en dehors des écoles, quelles que soient les intentions de Giorgia Meloni. dire. En effet, le fait que vous fassiez passer pour dangereux et inouï qu’un intellectuel aille dans un lycée pour parler politique est très inquiétant. La seule chose dont nous devons nous assurer est qu'un contre-interrogatoire a été garanti, ou qu'à un autre moment l'école a invité quelqu'un ayant une position opposée à celle de Canfora : la pluralité d'opinions doit toujours être garantie, afin que les étudiants soient examiner toutes les options et avoir une idée claire de la situation. Mais éliminer la politique est une erreur, car les enfants doivent entrer en contact avec elle : ils doivent avoir les outils pour comprendre le monde, sinon ils sont de véritables victimes de la propagande, dont la plus dangereuse est toujours celle qui vient du pouvoir.