Focalisée sur l’Ukraine, l’UE ignore complètement Gaza

Alexis Tremblay
Alexis Tremblay

L’Union européenne se concentre entièrement sur l’Ukraine et accorde très peu d’attention à Gaza. C’est ce qui ressort du Conseil européen des 14 et 15 décembre qui vient de se conclure à Bruxelles. Malgré les assurances apportées en conférence de presse par Charles Michel et Ursula von der Leyen, dans les conclusions finales adoptées à l’unanimité par les 27, une seule ligne très vague est consacrée au Moyen-Orient. Cependant, les promesses, l’argent et l’attention consacrés à Kiev et au conflit avec la Russie sont bien plus détaillés.

L’Union européenne promet 50 milliards à Kiev

« Le Conseil européen a tenu un débat stratégique approfondi sur le Moyen-Orient. » C’est la seule phrase écrite dans les conclusions de la réunion des dirigeants des États membres de l’UE à Bruxelles. C’est la seule relative à la guerre entre Israël et le Hamas et à la situation humanitaire dramatique dans la bande de Gaza. Ce choix est le résultat de profondes divisions entre les 27 pays du bloc européen ainsi que de l’attention plutôt portée sur Kiev. Bruxelles et les capitales européennes sont déterminées à allouer 50 milliards d’euros à l’Ukraine au cours des quatre prochaines années, mais sont pour l’instant bloquées par le veto hongrois de Viktor Orban.

Travailler sur le projet « Deux Peuples, Deux Etats »

Le président du Conseil européen Charles Michel a prononcé quelques mots supplémentaires sur le Moyen-Orient lors de la conférence de presse finale : « Nous avons constaté une forte unité autour de la nécessité de garantir la sécurité d’Israël et son droit à se défendre et nous avons condamné le choix du Hamas de utiliser les otages comme boucliers humains », a présenté l’homme politique belge. Michel a souligné combien les gouvernements des pays membres ont des « sensibilités différentes », entre ceux qui souhaitent une « pause humanitaire » et ceux qui demandent un « cessez-le-feu ». « Mais ce thème ne doit pas cacher l’essentiel, qui est la volonté commune et partagée de se mobiliser sur le plan humanitaire », a précisé Michel, et « du processus politique pour parvenir à une solution à deux Etats ». Le conflit au Moyen-Orient, a poursuivi le président, « est un conflit qui apporte du drame, de la douleur, de la souffrance et qui a des conséquences en termes de déstabilisation et de polarisation de nos sociétés ».

Différentes hypothèses sur l’aide humanitaire à Gaza

Après avoir réitéré sa condamnation des attaques perpétrées par le Hamas, il a déclaré : « Nous appelons à la libération des otages et répétons que le droit d’Israël à la défense doit être exercé dans le cadre du droit international et que l’accès humanitaire doit être garanti ». A cet égard, Michel a rappelé par exemple l’idée avancée il y a quelques semaines par Chypre de créer un « couloir maritime » pour soutenir Gaza et acheminer une plus grande quantité d’aide, évitant ainsi les blocus terrestres et les difficultés d’accès pour les camions remplis d’aide humanitaire. Cette solution entraîne à son tour d’autres problèmes logistiques, compte tenu de l’absence de ports dans la bande palestinienne donnant sur la Méditerranée, sur lesquels travaillent divers experts. « Au-delà de la dimension humanitaire, il y a le processus politique de création de deux Etats à considérer », a rappelé Michel, qui a révélé comment « des propositions visant à faire des progrès importants » avaient été faites, sans toutefois préciser ce que cela implique réellement.

Pas de sanctions pour les colons israéliens violents

On attendait beaucoup d’une décision concernant les colons israéliens, qui ont multiplié et intensifié les attaques contre les Palestiniens et leurs familles en Cisjordanie. La violence des colons avait déjà augmenté avant le 7 octobre, après que le gouvernement dirigé par Benjamin Netanyahu ait donné le feu vert à l’expansion des colonies. Au total, Israël compte plus de 700 000 colons répartis dans 150 colonies autorisées par le gouvernement et 128 avant-postes non autorisés en Cisjordanie et à Jérusalem-Est. Après l’attaque du Hamas, les attaques de colons contre les Palestiniens en Cisjordanie ont doublé. Des hommes armés et en uniforme sont apparus dans les villages palestiniens, menaçant de tuer quiconque ne partait pas, affirment les habitants, les militants pacifistes israéliens et l’ONU.

Pour ces raisons, l’Espagne, l’Irlande, Malte et la Belgique avaient avancé l’idée d’imposer des sanctions et poussaient au blocage de l’entrée et des avoirs des colons israéliens accusés de violences contre les Palestiniens en Cisjordanie, conformément aux décisions de les États-Unis. La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, s’est également déclarée favorable à l’initiative. Cette semaine, s’exprimant lors de la session plénière du Parlement européen à Bruxelles, l’homme politique allemand a déclaré que « l’augmentation de la violence des colons extrémistes inflige d’énormes souffrances aux Palestiniens ». Ceci, a-t-il poursuivi, « compromet les chances de parvenir à une paix durable. Cela pourrait également rendre la région toute entière plus instable ».

Les mots de Meloni sur le Moyen-Orient

L’idée de sanctions contre les colons avait été immédiatement combattue par l’Italie. Concernant l’impasse des 27 sur le conflit entre Israël et le Hamas et la situation dans les territoires palestiniens occupés, la Première ministre Giorgia Meloni s’est également exprimée à la fin du sommet. « Il y a eu une discussion très approfondie sur le Moyen-Orient, mais il a été préféré de réitérer les conclusions du dernier Conseil européen car si nous avions renouvelé ces conclusions d’une manière ou d’une autre, certaines divergences auraient probablement rendu le travail difficile. » Meloni a confirmé que l’Union européenne travaille sur l’idée de « deux peuples, deux États », en réitérant le travail sur le front humanitaire « que l’Europe peut faire et que l’Italie est en train de faire », a conclu le premier ministre. Toutefois, l’unanimité fait encore défaut pour une réponse compacte et incisive comme celle reçue à l’égard de l’Ukraine.

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