« Il aurait pu mieux utiliser son temps, en se préoccupant davantage de la sécurité de son pays et du nombre élevé de morts à Gaza. » Le chef de la diplomatie européenne, le haut-commissaire Josep Borrell, n’a pas apprécié la manière dont le ministre israélien des Affaires étrangères Israel Katz a abordé la réunion avec les ministres de l’UE à Bruxelles. Sur la table figurait entre autres la question de l’avenir de la bande de Gaza. Mais Katz se serait limité à évoquer le projet de son gouvernement de créer une île artificielle au large de Gaza. Pour faire quoi? C’est là que réside le mystère et la raison de la déception de Borrell (et pas seulement la sienne).
Selon certaines sources proches des discussions, Katz aurait évoqué la possibilité de transférer les Palestiniens vers cette île. Une hypothèse démentie par Tel-Aviv : « Il n’a jamais dit une telle chose – a souligné le ministère des Affaires étrangères dans une note – et un tel projet n’existe pas ». L’île artificielle, poursuit le ministère, serait utilisée pour contrôler l’entrée des marchandises dans la bande de Gaza. Selon une autre source européenne, Katz aurait indiqué que le projet (déjà évoqué en 2017, mais jamais démarré) aurait également pour objectif d’héberger une « usine de dessalement » d’eau de mer.
Quelle que soit la vérité (la réunion s’est déroulée à huis clos), il n’en demeure pas moins que Borrell et les ministres des pays appelant à l’arrêt immédiat des raids israéliens dans la bande de Gaza auraient préféré que Katz aborde le fond du sujet de la réunion. , c’est-à-dire le plan en 10 points présenté par Borrell pour mettre fin aux combats dans la bande de Gaza et parvenir à la création d’un État palestinien. Un plan qui va à l’encontre des intentions des partis les plus à droite du gouvernement de Tel-Aviv, mais aussi du Premier ministre Benjamin Netanyahu, qui s’est récemment prononcé contre l’hypothèse d’une « souveraineté palestinienne ».
C’est pourquoi Katz a probablement préféré échapper au plan et se présenter avec deux vidéos qui ont laissé les ministres européens stupéfaits. Le Haut-commissaire Borrell l’a dit sans mâcher ses mots, affirmant lors de la conférence de presse que Katz « nous a montré deux vidéos qui n’avaient rien à voir avec ce dont nous parlions. Nous avons eu le plaisir de voir deux vidéos très intéressantes : une sur un projet de île, qui devrait servir de port, je comprends. L’autre sur certains projets de construction d’une ligne ferroviaire qui reliera le Moyen-Orient à l’Inde. Ce dernier projet aussi, a poursuivi Borrell non sans ironie, « nous a semblé très intéressant, mais je crois que le ministre aurait pu mieux utiliser son temps, préoccupé par la sécurité de son pays et le nombre élevé de morts à Gaza », a-t-il conclu.
Le ministre des Affaires étrangères de l’Autorité nationale palestinienne Riyad Al-Malk (qui n’était pas invité à la réunion de Bruxelles) a été plus dur : « Expulser les gens de Gaza ? Les tuer tous ? Israël suscite la haine depuis des générations », a-t-il accusé. « Nous n’avons pas besoin d’îles, ni naturelles ni artificielles, nous resterons dans notre pays », a-t-il conclu.