La politique étrangère de l’Union européenne est l’un des domaines les plus complexes de cette institution déjà complexe. En effet, contrairement à d'autres domaines de la politique communautaire, celui-ci doit être décidé à l'unanimité. Et l’unanimité signifie qu’en fait chaque État dispose d’un droit de veto, ce qui rend souvent très compliqué la recherche d’un consensus sur une décision ou une simple déclaration. Cela s’est vu avec les sanctions contre la Russie, qui ont été entravées ou ralenties à plusieurs reprises par la Hongrie, mais aussi par d’autres pays qui ne voulaient pas que soient touchés des domaines susceptibles de mettre leur économie en difficulté.
Le lieu où se prennent les décisions de politique étrangère est évidemment le Conseil des Affaires étrangères de l’UE, un groupe de membres qui rassemble les ministres des 27 pays membres mais qui est différent des autres. En effet, si normalement la présidence du Conseil de l'UE est partagée par tous les États, qui se relaient à la tête pendant six mois chacun à tour de rôle, il existe dans ce cas une présidence fixe qui est confiée au Haut Représentant (le très long titre officiel est Haut représentant de l'Union européenne pour les affaires étrangères et la politique de sécurité), qui est actuellement le socialiste espagnol Josep Borrell. Le chef de la diplomatie européenne est choisi par le Conseil européen, donc par les 27 chefs d'État et de gouvernement, et est également de droit vice-président de la Commission européenne.
Son rôle est de représenter l'UE sur la scène mondiale, d'être la voix de l'Europe dans le monde, mais sa tâche la plus compliquée est de servir de médiateur et de trouver une synthèse entre les positions des Vingt-Sept, pour parvenir à celle qui est nécessaire, mais souvent très difficile, l'unanimité étant nécessaire pour prendre des décisions officielles. Cependant, le Haut Représentant peut parfois dépasser son rôle de simple médiateur et tenter d’entraîner l’Europe dans un sens ou dans un autre. Cela s'est vu par exemple avec la guerre à Gaza, avec Borrell qui a toujours été beaucoup plus virulent et plus clair dans sa critique de la réponse d'Israël, la jugeant disproportionnée par le nombre élevé de victimes civiles qu'elle réclamait, alors qu'il existait sur ce point un consensus pour un une déclaration commune (et donc une position officielle de l’UE) a été trouvée avec d’extrêmes difficultés et des tournures de phrases incroyables.
Outre le format classique des Affaires étrangères, ce Conseil se réunit également au sein de la formation Défense, donc avec les 27 ministres de la Défense, et du Développement (au sens de Coopération au Développement), toujours sous la présidence du Haut Représentant. La dernière formation dans laquelle il se réunit est celle du Commerce, celle qui s'occupe de la politique commerciale commune, des accords de libre-échange avec d'autres pays, comme le Ceta avec le Canada. Mais dans ce cas, elle relève de la présidence tournante et non du Haut Représentant.
D’un point de vue historique, la figure du Haut Représentant, avec le rôle qu’il assume aujourd’hui, est relativement récente. Le premier haut représentant a été l'Espagnol Javier Solana, ancien secrétaire général de l'OTAN de 1999 à 2009, dans un choix également symbolique. Cependant, les pouvoirs du chef de la diplomatie se sont accrus en 2009, avec l'entrée en vigueur du traité de Lisbonne, et la Britannique Catherine Ashton a occupé pour la première fois le poste « renforcé », à laquelle a ensuite succédé l'Italienne Federica Mogherini et maintenant Borrell.
Cet article et ces vidéos font partie de la rubrique « Europedia : le Trilogue et autres mystères de l'Union », réalisée en partenariat média avec Rai Radio 2, dans le cadre de l'émission Caterpillar, animée par Massimo Cirri et Sara Zambotti.