La Cour européenne « lance » la Super League : « abus de pouvoir de l’UEFA et de la FIFA »

Alexis Tremblay
Alexis Tremblay

Un arrêt historique, qui pourrait changer l’avenir du football : la Cour de justice européenne a donné raison à la Super League naissante dans sa bataille juridique contre l’UEFA et la FIFA. Pour les juges luxembourgeois, ces deux fédérations exerceraient en réalité un monopole dans les compétitions de football, ce qui, du moins au sein de l’UE, est contraire aux règles européennes de la concurrence. La porte est-elle ouverte à la nouvelle ligue promue par le Real Madrid et Barcelone, qui vise à rassembler les grands noms du continent comme la Juventus, l’Inter et Milan, en les éloignant de la Ligue des Champions ?

La phrase

La réponse à cette question n’est pas claire. Ce qui est sûr, c’est que pour la première fois une sentence risque de faire grincer le pouvoir, jusqu’ici incontesté, de l’UEFA et de la FIFA. « La Fédération internationale de football association (Fifa) et l’Union des associations européennes de football (UEFA) sont des associations de droit privé établies en Suisse – écrit la Cour – Leur objectif est de promouvoir et de définir le cadre du football au niveau mondial et européen. Ils ont adopté des règles qui leur donnent le pouvoir d’approuver les compétitions de football interclubs en Europe et d’exploiter les différents droits médiatiques liés à ces compétitions. Ce pouvoir d’approbation « préventive », expliquent les juges, est contraire au droit de l’UE.

En d’autres termes, les deux fédérations ne peuvent exercer un monopole sur le football et il serait légal de créer une compétition parallèle gérée par les clubs. « Les règles de la Fifa et de l’UEFA qui soumettent tout nouveau projet de football interclubs, comme la Super League, à leur approbation préalable et interdisent aux clubs et aux joueurs de participer à de telles compétitions, sont illégales – précisent en outre les juges – Il n’existe aucun cadre réglementaire pour les règles de la Fifa et de l’UEFA qui garantissent qu’elles sont transparentes, objectives, non discriminatoires et proportionnées ». La Cour pointe également du doigt la gestion des droits TV : « Les règles qui confèrent à la FIFA et à l’UEFA un contrôle exclusif sur l’exploitation commerciale des droits relatifs à ces compétitions sont de nature à restreindre la concurrence, compte tenu de l’importance des médias et des téléspectateurs dans la Communauté européenne ».

Que se passe-t-il maintenant ?

La naissance de la Super League il y a deux ans avait déclenché un tollé, notamment politique. La menace de l’UEFA et de certaines fédérations nationales (comme celle italienne) d’exclure les clubs « traîtres » (12 au total au début) des championnats et des compétitions européennes avait conduit à un brusque recul des équipes anglaises, et puis des italiens. Le projet a été réalisé ces derniers mois par le Real Madrid, aux côtés de Barcelone et d’A22, la société à l’origine de la Super League basée dans la capitale espagnole. C’est précisément cette société, avec les deux clubs espagnols, qui a promu l’action en justice qui, depuis les tribunaux ibériques, est maintenant parvenue au Tribunal de l’UE. « Nous avons obtenu le droit de concourir. Le monopole de l’UEFA est terminé », a déclaré Bernd Reichart, PDG de l’A22, qui promet des matchs gratuits à la télévision pour les supporters et des compensations plus élevées pour les clubs que celles accordées aujourd’hui par l’UEFA.

Il faut cependant ajouter que le projet de Super League n’a pas été apprécié par une grande partie des supporters et des clubs, notamment ceux qui seraient exclus de la nouvelle compétition. A22 jure que par rapport à l’idée initiale (une mini ligue de 12), il y aurait beaucoup plus d’équipes intéressées par le projet, peut-être une soixantaine. Et maintenant, il est prêt à dévoiler ses cartes grâce à l’arrêt de la Cour européenne. Mais il reste un doute juridique qui reste à lever : les juges européens ont précisé que leur décision « ne signifie pas qu’une compétition comme le projet de Super League doit nécessairement être approuvée ». Une phrase qui pourrait rendre la naissance de la nouvelle compétition encore difficile.

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