Quand une femme victime de violences est sauvée par son entreprise
À une époque où le débat sur les droits se réduit souvent à des déclarations superficielles, plus utiles pour promouvoir ceux qui les font que pour résoudre des problèmes, j’ai pris conscience d’une histoire qui n’a pas été médiatisée mais qu’il me semble important de raconter. Surtout aujourd’hui, à l’occasion de la Journée contre la violence à l’égard des femmes. Car il représente un exemple vertueux de la façon dont le travail, écosystème de relations, peut devenir un lieu de salut en cas de violences conjugales. Et parce qu’il raconte comment les entreprises réfléchissent enfin à leurs responsabilités envers leurs salariés, à contre-courant des données encore répandues sur les discriminations professionnelles. C’est l’histoire d’une femme qui a été aidée à se sauver grâce à son entreprise, mais c’est aussi le cas positif d’une entreprise qui, au fil des années, a su développer une réponse systémique à un problème tout aussi structurel comme celui de violence contre les femmes.
L’histoire
Au-delà des bancs rouges que vous verrez aujourd’hui dans les rues, et au-delà des débats de société, l’urgence est en effet de transformer l’indignation en un engagement concret. Et c’est précisément ce que représente cette histoire, survenue dans un contexte de travail. Parce que l’indépendance économique est la première forme d’émancipation, et parce que souvent, dans des histoires violentes pleines de manipulation et d’isolement, les collègues sont les seuls interlocuteurs qui restent. C’est une histoire qui restera sans visage, car la protagoniste ne sera pas exposée pour des raisons d’intimité, et raconte l’histoire d’une vendeuse, mère d’un enfant, à qui la célèbre chaîne de vêtements pour laquelle elle travaille a proposé de l’aider.
En effet, l’entreprise dispose d’un réseau d’« antennes » qui, après une formation spécifique, sont capables de reconnaître les situations de violence. Les femmes vivant dans des conditions critiques se voient offrir la possibilité de déménager dans un magasin dans une autre ville, en plus d’augmenter/diminuer leurs horaires de travail. Parallèlement, une double assistance est proposée, tant pour le début du parcours psychologique que pour le début du parcours juridique, qui comprend une aide financière et un accompagnement vers des professionnels de confiance. Un service que cette société, à savoir Inditex, a mis en place en collaboration avec le CADMI, un centre anti-violence bien connu. Plus d’une trentaine de femmes ont été aidées au fil des années : en effet, environ 10 000 personnes travaillent dans l’entreprise et plus de 80 % sont des femmes ; le réseau des « antennes » comprend environ 170 personnes et 17 ressources humaines réparties sur tout le territoire italien.
« Tu es enceinte, je te vire »: une mère expulsée de l’hôpital pour enfants (audio de l’appel téléphonique)
De plus en plus d’entreprises se sentent responsables de soutenir les femmes victimes de violences
Bien entendu, Inditex est l’une des multinationales les plus riches au monde, ce qui signifie qu’elle est plus structurée en interne. Mais depuis quelques temps la nécessité de ces initiatives est soulignée par diverses associations. Tout d’abord la « Fondation Libellula », qui mène des projets dans l’entreprise pour lutter contre les violences de genre, et qui explique comment 86% des personnes discriminées signalent le manque de point de référence dans leur contexte de travail. Par ailleurs, début novembre, « Valore D », un autre réseau d’entreprises, a présenté une nouvelle politique intitulée « Du silence à l’action », en collaboration avec l’association « Una niente e centomila » : dans le cadre justement d’un soutien tel qu’une aide financière. sous la forme d’une avance sur salaire, le déplacement des enfants vers une autre école ou un autre foyer. En juin, une exonération pour les entreprises est également entrée en vigueur pour favoriser l’embauche de femmes au chômage victimes de violences, bénéficiaires du revenu de liberté. Des initiatives nécessaires : les dernières données disponibles comptent 16 femmes tuées aux mains de leur partenaire dès avril 2024.
Mais les lieux de travail sont toujours le théâtre de discrimination et de harcèlement
Pourtant, même s’il apparaît comme une voie de salut, l’emploi reste un lieu de discrimination. Les entreprises ont encore beaucoup de travail à faire. C’est la Fondation Libellula elle-même qui offre un sombre aperçu de l’état de l’égalité des sexes dans sa dernière recherche « Enquête LEI », qui recueille les témoignages de 4 000 femmes. Quelques chiffres ? 40 % des femmes déclarent avoir subi des contacts physiques non désirés au travail. Près de 7 femmes sur 10 ont reçu des commentaires qui les ont mises mal à l’aise, notamment les femmes managers. Par ailleurs, près de 60 % déclarent avoir un salaire inférieur à celui de leur collègue masculin pour le même rôle, la même responsabilité et la même ancienneté (« Gender pay gap »). Et plus de 6 femmes sur 10 entendent circuler l’idée selon laquelle, si une femme a une carrière, c’est parce qu’elle a utilisé le levier de la séduction pour atteindre ses objectifs.
La « pénalité pour enfants » souligne au contraire qu’une mère qui travaille non seulement gagne moins que son collègue masculin, mais aussi moins que ce qu’elle gagnerait si elle n’avait pas d’enfants : encore aujourd’hui, en effet, près de 7 femmes sur 10 voient leur croissance chemin ralenti (ou celui d’autres femmes) en raison de la maternité ou d’autres rôles de soins. En fait, la catégorie d’indépendance économique mentionnée ci-dessus inclut également une autre dynamique, à savoir les possibilités inégales d’accès au marché du travail en raison des activités de garde et d’assistance familiale, qui ne sont toujours pas également réparties entre les sexes. Encore une circonstance dont on parle encore trop peu.
Le travail est un enfer pour les femmes : le harcèlement, le sous-payement et les carrières aggravent la situation
Si vous êtes une femme victime de violences, appelez le 112 ou le numéro anti-violence et anti-harcèlement 1522. Vous trouverez ici toutes les informations.
Si vous êtes une femme et que vous vous reconnaissez dans l’une des expériences rapportées, écrivez au LEI Help Desk, le premier service d’assistance national qui offre une écoute et un accompagnement gratuits aux femmes sur les épisodes de discrimination ou de harcèlement au travail.