Le « défi » entre Giorgia Meloni et Pedro Sánchez à la conférence sur le climat

Alexis Tremblay
Alexis Tremblay

Giorgia Meloni et Pedro Sanchez seront les principaux dirigeants importants de l’Union européenne (et au-delà) présents à la conférence sur le climat à Bakou. Tous deux pourraient profiter des nombreuses absences au sommet qui se déroule en Azerbaïdjan pour jouer un rôle de premier plan dans la plus importante conférence consacrée au changement climatique. La Cop29 sera pour eux l’occasion de renouveler un « défi » à distance entre les pôles politiques opposés du vieux continent. Le Premier ministre italien, représentant de l’ultra-droite européenne, a longtemps adopté une attitude modérée et « responsable » à Bruxelles, cultivant son entente avec Ursula von der Leyen, sans pour autant renoncer aux relations avec le dirigeant autoritaire hongrois Viktor Orban.

La lutte contre le changement climatique ne figure pas parmi ses priorités, mais sa présence pourrait être utile pour forger des accords encore plus solides avec l’Azerbaïdjan. Le pays hôte est un « champion » des énergies fossiles, dont le continent européen a doublé ses importations de pétrole et de gaz après le déclenchement de la guerre en Ukraine. En revanche, le Premier ministre socialiste reste le dernier bastion de la gauche européenne, de plus en plus isolée après l’effondrement de la coalition gouvernementale dirigée par Olaf Scholz en Allemagne. Le chef du gouvernement ibérique semble déterminé à ne rien lâcher dans un contexte qui voit l’extrême droite progresser dans presque tous les pays de l’UE. Sánchez tentera de convaincre les délégués d’adopter des mesures plus strictes en matière de transition énergétique. Une réponse au « bâton » reçu à Paiporta, alors qu’il rendait visite aux sinistrés des inondations de la région valencienne.

Qui était absent du sommet sur le climat de Bakou ?

Parmi les absents notables de la Cop29 figurent la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen, occupée dans la phase de transition vers son deuxième mandat et dans les auditions des commissaires désignés. Le président français Emmanuel Macron s’est également retiré après que Paris a condamné l’offensive de l’Azerbaïdjan contre les Arméniens du Haut-Karabakh. Le chancelier allemand Olaf Scholz a démissionné après l’effondrement de sa coalition gouvernementale. Dans le contexte hors UE, Xi Jinping et Vladimir Poutine seront absents, tout comme le président américain sortant Joe Biden. Parmi les absents figure également le Brésilien Luis Ignacio Lula, qui se remet d’une blessure à la tête. Ce sera à son tour d’accueillir le prochain Cop à Belem en 2025.

Des doutes sur l’utilité des COP climat

Les COP Climat sont confrontées à une crise de crédibilité. L’utilité d’un outil ayant une fréquence annuelle est remise en question, dont les résultats sont donc difficiles à évaluer pour des phénomènes pluriannuels et globaux. Les discussions techniques jouent également un rôle clé plutôt que la présence ou l’absence de dirigeants mondiaux. Même si les Italiens et les Européens sont bien conscients de ce que peut entraîner le désastre climatique (voir Émilie-Romagne et Valence), les conséquences immédiates de la transition énergétique (licenciements dans certains secteurs clés comme le secteur automobile, augmentation des coûts de l’énergie) sont de plus en plus lourdes. poids dans les évaluations des citoyens, notamment lors des urnes.

COP29, pourquoi la conférence climat de l’ONU est importante

Le principal enjeu de cette COP sera de s’accorder sur un nouvel objectif de financement climat applicable à partir de 2025. L’objectif est de dépasser le chiffre annuel de 100 milliards de dollars fixé par l’Accord de Paris. Nous nous efforcerons également d’adopter des mesures concrètes pour remplacer progressivement les combustibles fossiles par des énergies renouvelables.

Le rôle de Giorgia Meloni à Bakou

La délégation italienne conduite par le Premier ministre arrivera à Bakou le 13 novembre. Elle sera également accompagnée de Gilberto Picetto-Fratin, ministre de l’Environnement et de la Sécurité énergétique. Meloni pourrait jouer un rôle de médiation auprès du président élu Donald Trump, qui menace de se retirer des accords de Paris sur le climat et est prêt à appliquer des tarifs protectionnistes dans de nombreux secteurs. Un choix qui risque de ralentir le processus de réduction des émissions, ainsi que de modifier la dynamique du commerce international.

Même si le nouveau chef de la Maison Blanche ne sera pas présent à Bakou, le leader des Frères d’Italie pourrait profiter de la scène mondiale de la Cop29 pour lancer un message de détente et de collaboration entre Rome, Bruxelles et Washington. La Commission européenne dirigée par Ursula von der Leyen a déjà pris quelques pas en arrière par rapport aux engagements pris dans le cadre du Green Deal et entend rester un partenaire privilégié des États-Unis, tant sur le plan commercial que diplomatique. En revanche, tourner le dos à la transition énergétique signifierait un recul par rapport à la Chine et à d’autres pays comme ceux du Golfe, qu’il faut orienter dans cette direction.

Le rôle de Sánchez à la Cop29 en Azerbaïdjan

Pedro Sánchez a quand même décidé de se rendre à Bakou, malgré la crise due à Dana. Les plus de 200 morts dans la province de Valence pèseront comme une brique géante qui sera traînée jusqu’en Azerbaïdjan. Le leader socialiste a dès le début lié la catastrophe au réchauffement climatique, même si les responsabilités de la Generalitat valencienne dans la gestion du territoire et de l’urgence ont contribué à la catastrophe. Sánchez pourrait être moins conciliant que Meloni et insister sur des efforts plus précis et plus rapides visant à la décarbonation et à une augmentation des investissements dans les énergies renouvelables.

En arrière-plan les auditions de Fitto et Ribera

Parallèlement, les deux dirigeants s’emploieront à suivre à distance l’issue des auditions de leurs commissaires désignés au Parlement européen. Raffaele Fitto, membre des Fratelli d’Italia (Ecr) désigné comme vice-président exécutif, est attendu à Bruxelles dans la matinée du 12 novembre. L’Italien mise sur le soutien du Parti populaire, mais craint d’être « bousculé » par les Socialistes et les Verts.

L’autre audience clé, dans la soirée, est celle de l’Espagnole Teresa Ribera, nommée vice-présidente pour la « Transition propre, juste et compétitive ». Fitto et Ribera sont étroitement liés. Ce n’est que si l’un est approuvé que l’autre recevra le feu vert de la Chambre européenne. Les rumeurs indiquent que les socialistes sont prêts à « se pincer » et à voter pour le loyaliste de Meloni, juste pour voir Ribera aux côtés de von der Leyen. Madrid et Rome attendront avec impatience le résultat de Bruxelles.