Il s'appelle déshydratation stratosphérique intentionnelle une nouvelle proposition géoingénierie climatiquedéveloppé par le Chemical Science Lab de la NOAA et publié sur Avancées scientifiquesselon lequel il serait possible – du moins en principe – de lutter contre le réchauffement climatique en diminuant la quantité de vapeur d'eau dans la stratosphère (la couche de l'atmosphère située entre environ 9-18 km et 50 km d'altitude) en la « ensemençant » avec des particules de triiodure de bismuth sur lequel la vapeur peut se condenser pour former des nuages et des précipitations grâce à la technique d'ensemencement des nuages. L'idée est basée sur le fait que la vapeur d'eau est le gaz à effet de serre naturel le plus abondantcapable de retenir d'énormes quantités de chaleur dans l'atmosphère terrestre.
En quoi consiste la déshydratation stratosphérique ?
La proposition consiste enempêcher la vapeur d’eau d’atteindre la stratosphère, où, en l'absence de particules agissant comme noyaux de condensation, il peut rester pendant des années, contribuant ainsi au réchauffement climatique par effet de serre. La NOAA estime que la contribution de la vapeur d'eau stratosphérique à l'augmentation de la température moyenne mondiale pourrait atteindre 30 %.
C’est là qu’intervient le triiodure de bismuth, un composé qui induit la nucléation de la vapeur d’eau en cristaux de glace qui forment ensuite des nuages. L'idée est d'injecter particules de 10 nanomètres de diamètre de ce composé dans certaines régions du monde affectées par de puissants courants ascendants qui parviennent à atteindre la stratosphère. Le plus important de ces « injecteurs » d’air chaud et humide se trouve au-dessus de l’océan Pacifique équatorial occidental, une région de la taille de l’Australie. Tandis que la vapeur d'eau contenue dans l'air monte, rencontrant des pressions et des températures plus basses se condense en nuages à partir duquel les précipitations peuvent se développer : elles sont ainsi empêchées d'atteindre la stratosphère.
Avantages et inconvénients de cette technique
Dans un scénario optimiste, ils suffiraient 2 kg par semaine de ces particules transformer ces « paquets » d’air humide en nuages : une quantité qui pourrait être pulvérisée depuis des montgolfières ou des drones, sans avoir besoin d’avions. Pouvoir utiliser de petites quantités d’un composé non toxique est certainement un avantage. Le fait que les injections de ce composé n’auraient lieu que dans des zones relativement petites de la planète est également un avantage de cette proposition. En effet, on estime que dans ces zones la moitié de la vapeur d'eau est concentrée dans 1% de la masse atmosphérique affectée par les courants ascendants, ce qui rend la proposition réalisable même avec des sondes ou des drones seuls, sans l'intervention d'avions.
Daniel Cziczo, chimiste atmosphérique à l'Université Purdue (Indiana, États-Unis), estime que l'idée est intéressante mais qu'elle pourrait comporter des risques. Si les graines ne parviennent pas à former des nuages au bon endroit et à se propager ailleurs, elles pourraient accélérer la formation de nuages. mauvais types de nuages: par exemple ceux qui sont grands et minces, comme moi cirrus Hé cirro-stratus, qui réfléchissent peu le rayonnement solaire entrant, mais absorbent le rayonnement infrarouge (qui réchauffe) émis par la surface. En d’autres termes, si tout ne se passe pas comme espéré, l’intervention pourrait s’avérer contre-productive.
Aussi Marc Schöberlun scientifique atmosphérique de la Science and Technology Corporation, qui avait précédemment identifié la « porte stratosphérique » dans le Pacifique tropical occidental, a convenu de la nécessité de poursuivre les études à cet égard, a déclaré :
Il est préférable d’éviter les conséquences indésirables et de procéder à une évaluation claire des coûts de mise en œuvre. La technique ne sera probablement pas efficace toute l’année, car la majeure partie de l’eau atteint la stratosphère pendant les saisons de mousson asiatique. On ne sait pas non plus dans quelle mesure une réduction de l’eau stratosphérique pourrait refroidir la surface.
Enfin, il faut dire que l’effet d’une déshydratation atmosphérique intentionnelle pourrait être très modeste : selon une estimation, cela ne compenserait que 1,4 % du réchauffement climatique accumulé pendant l’ère industrielle.
Parce que c'est une proposition controversée
La perspective de résoudre les problèmes environnementaux de notre planète grâce à la géo-ingénierie est profondément controversée, car intervenir sur des systèmes complexes, tels que le climat de la Terre, peut facilement avoir des effets inattendus. Cela ne résout pas non plus le problème fondamental de l'utilisation des combustibles fossiles : ce serait comme si remédier aux symptômes sans guérir la maladie.
Mais aujourd’hui, ces controverses s’apaisent partiellement, laissant entrevoir ouvertures plus grandes dans cette direction. L’Union européenne, par exemple, soutient la recherche sur la gouvernance de la géo-ingénierie. Et la Suisse a invité fin février les Nations Unies à soutenir la recherche dans ce domaine.
Les climatologues ont des réserves quant à l’exploration de ces nouvelles voies alternatives, mais certains pensent qu’ils n’ont pas le choix. Les réductions d’émissions n’ont pas été assez rapides, et ne le sont toujours pas, et le dioxyde de carbone ne peut toujours pas être extrait de l’air à moindre coût.