Qui sont les commissaires européens qui devront gérer les relations avec la Chine

Alexis Tremblay
Alexis Tremblay

Après des semaines d’attente et de spéculations, la présidente de la Commission, Ursula von der Leyen, a finalement annoncé la composition de la nouvelle Commission européenne, qui dirigera l’exécutif communautaire pour les cinq prochaines années. Confronté à de nombreux défis économiques et sécuritaires, le numéro un de la Commission a choisi de confier les tâches les plus délicates à des commissaires espagnols, français et slovaques, pour la gestion des relations extérieures, notamment avec la Chine.

Quels sont les commissaires qui devront dialoguer (et argumenter) avec Pékin

Bruxelles et Pékin risquent de s’engager dans une dangereuse guerre commerciale, après l’annonce de droits de douane sur les voitures électriques fabriquées en Chine et l’opposition de Bruxelles aux « pratiques concurrentielles déloyales » de Pékin. Le Letton Valdis Dombrovskis, du PPE, a quitté la case Commerce pour passer dans la case Économie et Productivité. Le Slovaque Maros Sefcovic, chef du Commerce et de la Sécurité économique, prend sa place.

Dans la lettre de mission que le président a remise à Sefcovic, le Slovaque est chargé de gérer les relations commerciales et économiques avec la Chine « conformément à notre politique de réduction des risques », en promouvant un commerce « libre et équitable ». Concernant la sécurité économique, Von der Leyen a demandé à Sefcovic de continuer à travailler sur les contrôles des exportations et le filtrage des investissements quittant l’Union européenne.

Les Français sont responsables de la sécurité économique et de la protection du brandy

Un autre commissaire désigné pour s’occuper de la sécurité économique et commerciale européenne est le Français Stéphane Séjourné, vice-président exécutif pour la politique industrielle. Remplaçant de dernière minute du sortant Thierry Breton, démissionnaire suite à une polémique avec von der Leyen, Séjourné connaît bien la Chine, rivale économique de l’Union européenne, avec laquelle il a déjà eu affaire lorsqu’il occupait le poste de ministre français des Affaires étrangères.

En avril dernier, Séjourné a rencontré son homologue chinois Wang Yi à Pékin pour discuter des échanges culturels et de la coopération bilatérale. Lors de sa rencontre en face-à-face avec Séjourné, Wang a espéré que Paris prêterait attention aux « préoccupations légitimes et raisonnables » de la Chine et garantirait un environnement commercial « juste et non discriminatoire » pour ses entreprises. Traduit : le géant chinois demande de ne pas promouvoir les tarifs sur les voitures électriques voulus par von der Leyen ; en échange, Paris pourrait éviter une issue négative à l’enquête antidumping ouverte par Pékin sur les vins fortifiés importés de l’Union européenne et donc de France.

Depuis janvier dernier, le brandy français s’est également retrouvé dans le viseur des autorités chinoises pour une prétendue violation des règles de concurrence, pouvant entraîner une augmentation des droits de douane. Avec un quart des bouteilles expédiées vers la Chine, son premier marché après les Etats-Unis, le brandy français est ultra dépendant des exportations, représentant 98 % de ses ventes. Selon les données du Bureau national interprofessionnel du cognac (BNIC), la Chine représentait 19,4 % des exportations en 2023, et le marché chinois est plus rentable que les autres. Si Pékin décide finalement d’introduire des droits de douane élevés, les entreprises françaises risquent de se retrouver avec d’importantes quantités de cognac difficilement écoulables ailleurs, leur causant des milliards de dégâts.

L’appel de l’Allemagne : « Éviter une guerre commerciale »

Il y a ensuite la question de la transition énergétique, élément clé du Green Deal européen qui sera géré par la vice-présidente du gouvernement Sanchez, l’Espagnole Teresa Ribera (Socialistes et Démocrates). La mobilité durable, l’un des piliers dont dépend le succès du Green Deal européen, se traduit entre autres par la généralisation des voitures électriques.

Bruxelles rejette les propositions des constructeurs chinois qui souhaitent éviter les taxes sur les voitures électriques

Et si Bruxelles veut atteindre ses objectifs climatiques ambitieux tout en préservant la compétitivité commerciale des entreprises européennes, elle devra évoluer en accord avec la Chine pour ne pas se laisser écraser par le secteur automobile de la République populaire. Le vice-chancelier allemand Robert Habeck en est convaincu, invitant Bruxelles et Pékin à « trouver une solution négociée » à l’impasse sur la taxation des voitures électriques chinoises pour « éviter une guerre commerciale avec une spirale tarifaire qui, à terme, nuirait aux deux parties ». L’Allemagne accroît la pression sur les négociateurs européens après que l’Espagne a demandé la semaine dernière à Bruxelles de revoir sa position.

Des négociations au point mort

Les portes d’un accord négocié restent ouvertes. Le 19 septembre, le ministre chinois du Commerce, Wang Wentao, se rendra à Bruxelles pour tenter de convaincre le commissaire européen au Commerce, Valdis Dombrovskis, d’abandonner l’idée d’une imposition de droits de douane par l’UE. Avant de devenir définitifs, les droits de douane doivent être confirmés par un vote des 27 États membres de l’UE, qui passera au vote final le 25 septembre. La Commission accuse Pékin de fausser la concurrence en subventionnant massivement les producteurs sur son territoire, leur permettant de proposer des prix plus bas.