Parlez-moi de vous : Chiara Gamberale parle de l’angoisse de grandir
Parlez-moi de vous, demande Chiara aux personnes qui, d’une manière ou d’une autre, ont fait partie de son passé et ont été importantes dans sa jeunesse. Des personnes perdues en chemin mais jamais oubliées, recherchées et retrouvées via les réseaux sociaux. Avec quel objectif ? Renouer les fils du passé (peut-être), interroger d’anciens amis, premiers coups de coeur et simples connaissances sur ce qu’ils sont devenus, des années plus tard, et surtout comprendre s’ils ont eux aussi trébuché et trouvé des obstacles sur le chemin qui mène à la maturité. C’est le contexte autour duquel il s’articule Parle-moi de toile dernier ouvrage de l’écrivain et auteur Chiara Gamberale, publié chez Einaudi.
Gamberale est un roman atypique et introspectif, qui parle de besoins et de devoirs : la nécessité de vivre sa vie à sa manière, pourquoi pas avec un peu de cynisme, sans se soucier des conventions sociales ; les devoirs, cependant, envers Bambina, la fille de six ans, étaient « dans des circonstances d’adolescence », bien que Chiara ait la quarantaine. C’est aussi de là que viennent ses incertitudes, sa peur d’avoir une mauvaise approche de la vie, au point de se définir comme une « enfant pourrie », une femme qui a grandi mais mûri tard, de la mauvaise manière. Ainsi, entrer en contact avec les personnes qui ont peuplé son passé, comprendre leur évolution et découvrir si eux aussi ont dû parcourir un chemin de vie semé d’embûches, a un pouvoir aux nuances rédemptrices.
Chiara, la protagoniste, fouille en elle-même en fouillant dans la vie des autres. Elle le fait avec une certaine rigueur, car ce n’est qu’ainsi qu’elle pourra véritablement faire la paix avec la personne qu’elle est devenue depuis vingt ans : c’est le hasard de la rencontre avec une amie qu’elle n’a pas vue depuis le lycée qui lui a donné le idée de recontacter les gens qu’il mythifiait lorsqu’il était adolescent. Pour atteindre cet objectif, elle est prête à voyager en Islande, laissant sa petite fille avec son père.
L’enregistreur sur la table, tel un journaliste, interviewe Raffaello, Ivan, Riccarda, Stefano, ceux qu’il définit comme ses « étoiles du nord ». Les questions sur sa vie ne sont pas autorisées, ce sont les accords, car pour « transformer le marais en pleine mer », il doit s’appuyer exclusivement sur les histoires des autres, sans mélanges, pour pouvoir, par comparaison, trouver un équilibre entre son condition d’éternelle adolescente avide d’émotions et celle de femme et de mère responsable. Sans se déformer et sans perdre l’essence de son identité la plus profonde.
En un peu plus de deux cents pages au déroulement fluide, Chiara Gamberale mêle sentiments et émotions, elle n’a pas peur de mettre à nu une partie d’elle-même, d’exprimer ses peurs et ses espoirs. Cela illustre son manque de stabilité émotionnelle, qui est le même que celui d’au moins deux générations de personnes, oscillant entre trente et quarante ans, piégées dans l’inconscience, souvent incapables de trouver un équilibre entre les rêves (peut-être brisés) et ce que l’on a. devenir.