Les entreprises étrangères pourraient être exclues du Trésor public européen

Alexis Tremblay
Alexis Tremblay

Les entreprises des pays ne faisant pas partie de l’Union européenne ne peuvent pas participer aux marchés publics européens s’il n’y a pas d’accord international signé avec Bruxelles. C’est l’arrêt lapidaire que rend aujourd’hui la Cour de Justice européenne, après l’affaire qui a explosé sur la procédure de marché public relative à la construction d’un réseau ferroviaire pour relier deux villes de Croatie. Les appels d’offres européens constituent une riche source de revenus pour les entreprises étrangères qui souhaitent se faire connaître sur le marché européen. Il suffit de dire que dans l’Union européenne, les marchés publics s’élèvent à plus de 2 000 milliards d’euros par an, soit environ 14 % du PIB des 27 États membres.

Turquie contre Croatie

Prenons du recul. Une société turque, Kolin Inșaat Turizm Sanayi ve Ticaret (Kolin), avait contesté la légitimité de la décision d’attribuer le marché à un autre soumissionnaire, la société croate HZ Infrastruktura (affaire C-652/22). La Haute Cour administrative croate s’est ensuite tournée vers la Cour de justice européenne pour clarifier les circonstances dans lesquelles, après l’expiration du délai de soumission des offres, les entrepreneurs peuvent demander aux soumissionnaires d’apporter des corrections ou des éclaircissements.

En d’autres termes, le tribunal luxembourgeois était appelé à se prononcer sur deux questions. Tout d’abord, les entreprises des pays tiers, avec lesquels l’Union européenne n’a pas signé d’accord sur les marchés publics, peuvent-elles participer aux appels d’offres publics dans les 27 États membres de l’UE ? Et encore une fois, est-ce aux pays de l’Union européenne de fixer les conditions dans lesquelles les entreprises non européennes peuvent participer aux appels d’offres des marchés publics ?

Ce que la Cour européenne a décidé

Telles sont les questions auxquelles a répondu la Cour de Justice européenne, qui s’est prononcée sur l’interprétation de la directive 2014/25/UE, c’est-à-dire celle relative aux marchés publics des entités opérant dans les secteurs de l’eau, de l’énergie, des transports et des services postaux.

La Cour basée à Luxembourg a donc établi que les entreprises de pays tiers qui, comme la Turquie, n’ont pas conclu d’accord international avec l’Union ne peuvent pas participer à un appel d’offres public, invoquant l’égalité de traitement à l’égard des entreprises des États membres ou de celles des États membres. les pays qui ont signé un accord avec Bruxelles (qui en a la compétence exclusive). Par conséquent, a précisé la Cour européenne, le procès intenté par le turc Kolin n’existe pas.

Les autres pays hors Union sont-ils également exclus ?

L’arrêt de la Cour européenne de justice pourrait également s’appliquer à d’autres pays tiers, et pas seulement à la Turquie. La Chine s’est en effet retrouvée dans le collimateur de la Commission pour avoir participé à des appels d’offres publics dans plusieurs États membres, en soumettant une offre inférieure au prix de l’enchère. C’est ce qui s’est produit avec Nuctech, l’entreprise chinoise qui, au cours des cinq dernières années, s’est vu confier 95 % des fournitures douanières pour le contrôle des marchandises sur le territoire européen mais aussi italien.

La Chine a la main sur la sécurité des ports et aéroports italiens