Huile d’olive : parce qu’elle est de plus en plus chère et que les arnaques se multiplient

Alexis Tremblay
Alexis Tremblay

L’huile d’olive, pilier du régime méditerranéen, en plus d’être de plus en plus chère, devient le protagoniste d’une fraude alimentaire fréquente. Dilué avec d’autres huiles, altéré par des pesticides ou vendu avec de fausses étiquettes. Le phénomène est varié, mais il nous révèle une tendance claire : l’or liquide de la Méditerranée, rare en raison du changement climatique mais de plus en plus demandé, est devenu attractif pour la criminalité. En 2023, 380 tonnes de produits pétroliers ont été saisies par l’Inspection centrale italienne pour la protection de la qualité et la répression de la fraude des produits agroalimentaires (Icqrf). Le phénomène n’est pas seulement italien, mais s’étend à toute l’Europe. Outre la Péninsule, les arnaques concernent principalement l’Espagne et la Grèce, deux autres patries de l’huile d’olive.

Derrière la multiplication de ces arnaques alimentaires, il y a (aussi) l’augmentation du prix de l’huile d’olive extra vierge, qui pousse les gens à se tourner vers des produits moins chers pour ne pas changer leurs habitudes alimentaires. Depuis 2018, le prix de l’huile d’olive a plus que doublé. Les agriculteurs, en particulier les petits, ont de plus en plus de mal à produire, dans un contexte de sécheresse et d’un marché défavorable. Dans les supermarchés, on trouve en abondance des bouteilles de plus en plus chères de marques italiennes, qui pressent pourtant génériquement des olives en provenance de l’Union européenne. Dans ce contexte, le phénomène de la fraude pétrolière se propage et en profite pour tromper les consommateurs, qui se trompent en pensant qu’ils paient moins et sont perdants, même en termes de santé.

Comment escroquer l’huile d’olive

Plus de 2 millions d’euros. C’est la valeur globale des 380 tonnes de bouteilles d’huile saisies par l’Inspection centrale italienne pour la protection de la qualité et la répression de la fraude des produits agroalimentaires (Icqrf). 17 personnes ont été déclarées responsables d’avoir étiqueté les bouteilles de manière erronée ou manquante. En novembre de l’année dernière, 2 550 mille kg d’huiles déclarées comme huiles d’olive, composées en réalité de mélanges d’huiles végétales, ont été récupérées par les autorités italiennes. La valeur dans cette affaire était d’environ 250 mille euros. En avril, 900 litres supplémentaires ont été saisis dans la province de Naples dans des conteneurs en fer blanc portant des étiquettes contrefaites d’une marque italienne bien connue. Nous ne parlons pas de petites arnaques, mais d’un véritable business. La fraude potentielle et les faux étiquetages sont un phénomène à l’échelle de l’UE.

Huile de voyage

Les huiles contaminées ont tendance à voyager. Les cas de bouteilles avec des étiquettes incorrectes et faisant l’objet d’une fraude potentielle interceptées aux frontières n’étaient que de 15 en 2018, au cours des trois premiers mois de 2024, ils sont passés à 50. Derrière ces chiffres, le soupçon fondé est qu’il existe d’autres bouteilles beaucoup plus importantes. celles cachées, étant donné que ces données font référence aux marchandises que les autorités européennes ont réussi à intercepter. Certains cas affectent directement la santé publique. Les huiles saisies contenaient même des morceaux de verre, mais aussi des pesticides et des huiles minérales. Les fraudes les plus courantes concernent les mélanges.

L’huile d’olive est donc devenue le nouveau business des escrocs

La quantité d’huile d’olive extra vierge est minime (voire inexistante) et la bouteille est remplie de mélanges d’huiles végétales (comme le maïs et le tournesol) de moindre coût et de moindre qualité, mais mélangées de manière à tromper les acheteurs, à du moins en ce qui concerne la couleur. L’un des cas les plus graves a été signalé en Allemagne. Les autorités allemandes ont intercepté des bouteilles en provenance d’Israël commercialisées sous le nom d' »huile d’olive extra vierge » mais qui contenaient en réalité de l’huile lampante, un produit considéré comme impropre à la consommation humaine sans raffinage supplémentaire. Il existe des huiles qui « font d’immenses tournées », comme celles provenant de Syrie, qui sont entrées dans le bloc européen par les Pays-Bas et qui ont ensuite voyagé directement vers les autres États membres comme s’il s’agissait d’olives produites dans l’UE.

Des contrôles plus nombreux et plus approfondis

Selon la Commission européenne, l’augmentation des signalements témoigne de « meilleurs échanges entre les autorités compétentes des États membres » et de « leur vigilance contre la fraude dans la chaîne d’approvisionnement agroalimentaire », a commenté un porte-parole de Gardien. Ces contrôles plus précis sont également le résultat de nouvelles règles introduites par Bruxelles en 2022, qui concernent également les modalités d’analyse de ce précieux liquide. Malgré ces assurances, les craintes des consommateurs demeurent. Sur les 182 notifications signalées depuis le début de l’année 2023, la plus grande partie (54) concernait des produits en provenance d’Italie, suivis de l’Espagne (41) et de la Grèce (39). Les experts soupçonnent que la fraude est plus importante là où les contrôles sont moins nombreux, donc dans les zones plus isolées, dans les petites épiceries ou par le biais de ventes informelles et dans les restaurants des zones périphériques.

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La crise pétrolière

La production d’huile d’olive a subi une forte baisse, le changement climatique perturbant certaines des régions les plus productives de la planète, notamment l’Espagne. Les agriculteurs ibériques, qui produisent plus de la moitié de l’huile d’olive mondiale, ont été confrontés à des vagues de chaleur et de sécheresse répétées. Les données sont claires. En 2018/2019, l’Union européenne a produit à elle seule 2,264 millions de tonnes d’huile d’olive, alors que les prévisions pour 2023/2024 ne sont que de 1,510 millions de tonnes. Il est clair que les prix dans les rayons vont encore augmenter. D’environ 7 euros le litre en 2018, nous sommes passés à plus de 10 euros cette année et de nouvelles augmentations sont attendues. Parmi les trois principaux pays producteurs de l’UE, l’Italie est celui où les prix de l’huile d’olive extra vierge sont les plus élevés, la Grèce et l’Espagne étant plus compétitives. Cela signifie que « tricher » sur le pétrole, notamment sur le pétrole italien, qui est en soi plus cher, devient une attraction très intéressante pour ceux qui ont l’intention de tricher.