Assez de revenus citoyens et de réductions des accueils, le plan de Merz pour la nouvelle Allemagne

Alexis Tremblay
Alexis Tremblay

Moins de migrants et de demandeurs d’asile, des réductions du « revenu des citoyens » et des armes plus puissantes pour l’Ukraine. Tels sont les piliers sur lesquels Friedrich Merz, leader des démocrates-chrétiens allemands en tête des sondages à l’approche des prochaines élections en Allemagne, construira sa campagne électorale. Merz, décrit chez lui comme un conservateur intransigeant, est destiné à reprendre l’héritage du social-démocrate Olaf Scholz, à la tête du pays à partir de 2021. L’axe du centre-droit allemand s’est nettement déplacé plus à droite, avec Merz promet de revenir à la garantie d’un gouvernement « fiable, prévisible et calculable ».

La CDU ambitionne de rassembler les voix des déçus par la « coalition des feux tricolores », qui s’est effondrée sous le poids des conflits entre sociaux-démocrates, verts et libéraux. Dans le même temps, il entend s’approprier le soutien du parti d’extrême droite Alternative pour l’Allemagne (AfD). Le parti, faisant l’objet d’une enquête pour sympathies néo-nazies attribuées à certains de ses principaux représentants, a obtenu des résultats importants en Saxe, en Thuringe et dans le Brandebourg lors des dernières élections régionales. Les sondages pourraient réserver bien des surprises, avec une population allemande moins confiante dans l’Europe et risquant de se laisser submerger par les crises de certains de ses géants industriels comme Volkswagen ou Thyssen Krupp.

Quand voter en Allemagne en 2025

Après le vote de confiance perdu par Olaf Scholz, l’Allemagne se dirige officiellement vers les urnes. La date à inscrire sur le calendrier est le 23 février. La campagne électorale allemande a officiellement débuté avec la présentation du manifeste de l’alliance Union chrétienne (CDU/CSU) par le chef de l’opposition Friedrich Merz. Le représentant du centre-droit a juré aux électeurs de ramener au pays l’harmonie tant manquée aux Allemands. Pour ce faire, l’ancien banquier se concentre sur certains thèmes classiques de la droite (immigration, défense et coupes sociales), s’éloignant également de la direction précédemment indiquée par l’ancienne chef du parti Angela Merkel, qui a gouverné pendant 16 ans un pays qui était un symbole de bien-être pour toute l’Europe.

Les propositions du centre-droit allemand sur les migrants

Sur le thème des migrants, le centre-droit allemand réclame une politique d’asile plus restrictive, ainsi qu’un gel de l’admission des demandeurs d’asile à la frontière. Les propositions risquent d’entrer en conflit avec le droit existant de l’Union européenne. En vertu de la Convention de Genève, les pays de l’UE sont tenus d’examiner les demandes d’asile une fois qu’un demandeur se trouve sur le sol européen. Ce n’est que dans les cas où les demandeurs d’asile représentent un danger public que les autorités frontalières peuvent refuser leur entrée.

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Mais ces dernières années, Bruxelles a fermé les yeux sur les refus mis en œuvre par exemple par la Grèce et la Croatie et s’est montrée disposée à évaluer des « solutions alternatives », comme les centres en Albanie construits par Giorgia Meloni. Autre point du manifeste de la CDU : la suppression de la protection subsidiaire pour les demandeurs d’asile, également sanctionnée par le droit européen au titre de la Convention de Genève. Le parti affirme également vouloir désigner davantage de pays comme « sûrs » afin de pouvoir expulser les migrants plus rapidement. Enfin, il propose de supprimer la possibilité du « double passeport » dont bénéficient actuellement les immigrés. Merz compte sur le soutien d’Ursula von der Leyen, chef de la Commission européenne, pour réaliser ses projets et promouvoir un changement du droit européen.

Baisse d’impôts et « frein à l’endettement » pour remporter les élections

Parallèlement à sa ligne dure en matière d’immigration, la CDU met l’accent sur les réductions d’impôts. En plus d’accuser le gouvernement récemment déchu d’avoir entraîné le pays dans la « récession », le centre droit propose de réduire l’impôt sur les sociétés à 25 % et de supprimer l’impôt de solidarité. Il prévoit également d’augmenter le taux d’imposition maximum à 80 mille euros et de réduire la TVA dans le secteur de la restauration. Surtout, la CDU se dit prête à maintenir le « frein à l’endettement », qui limite strictement le déficit public. Lorsqu’il était chef du gouvernement, Scholz avait demandé à plusieurs reprises de réformer le frein, mais ce choix a creusé le fossé avec les autres membres de la coalition, notamment avec les libéraux.

Merz entend également introduire un nouveau système de « sécurité de base » pour remplacer l’actuel, qui prévoit l’attribution d’un minimum de 402 euros par mois aux chômeurs. L’idée est de réduire le nombre de personnes ayant droit à ce type de « revenu citoyen », en investissant davantage d’argent dans ceux qui recherchent activement du travail, en les soutenant également par des cours de langue et en améliorant l’efficacité des centres de recherche d’emploi. En matière de sécurité, Merz a proposé d’installer des caméras vidéo et des logiciels de reconnaissance faciale dans les « points chauds et dangereux » du pays, en éliminant les mosquées où sont pratiqués « la haine et l’antisémitisme ». Il s’en est ensuite pris à l’extrémisme de gauche comme de droite.

Merz promet des missiles Kiev Taurus

La politique étrangère voit plutôt la CDU s’orienter vers un soutien militaire plus décisif à l’Ukraine. Il y a quelques semaines, sur les réseaux sociaux, Merz a promis qu’une fois devenu chancelier, il enverrait immédiatement des missiles Taurus à Kiev, afin d’atteindre des cibles russes au-delà des frontières ukrainiennes. La suppression des restrictions sur l’usage des armes contre la Russie marque une nouvelle rupture avec l’attitude prudente adoptée par Scholz au cours de ces deux ans et demi de conflit. Lors de la conférence de presse, Merz a toutefois précisé qu’un pays en guerre ne pouvait pas devenir membre de l’OTAN. Son soutien à Kiev est indéfectible, mais aussi pragmatique. La CDU/CSU oscille actuellement autour de 30%. Pour gouverner, il aura encore besoin d’un autre parti pour le soutenir et le SPD de Scholz pourrait alors redevenir un allié plutôt qu’un ennemi.