Pietro Castellitto, un talent ou surfait ?
Énée de Pietro Castellitto fait déjà beaucoup de bruit, le même qui a résonné au Lido, lors de la dernière Biennale, lorsque le nouvel enfant prodige du cinéma italien a obtenu une fois de plus le même résultat identique à celui qu’il avait obtenu avec Les Raiders, sa première œuvre primée à Venise en 2020 : divise, de la manière la plus absolue, de la manière la plus claire, les critiques comme le public. Mais qui est Pietro Castellitto ? Une nouvelle promesse, un feu vide, un espoir ou est-ce déjà une déception ?
Le supporter de D’Annunzio est arrivé du nord de Rome en provenance du Vietnam
Pour ceux qui l’ont suivi, pour ceux qui ont vu ses films et ses performances, Pietro Castellitto reste une créature aussi fascinante qu’énigmatique. De ce point de vue Énée, désormais en salles par Vision Distribution, est une confirmation, ou plutôt une soulignement de toutes ses qualités et de tous ses défauts. Il reste le sentiment que, malgré toutes les critiques qui peuvent lui être adressées, il existe un juste préjugé (puisque nous sommes en Italie) contre lui en tant que fils d’un des acteurs les plus importants et les plus puissants de notre scène (son père est Sergio Castellitto, la mère est l’écrivain Margaret Mazzantini, éd), Pietro Castellitto a beaucoup de talent. Bien entendu, son parcours artistique ne répond jusqu’à présent qu’à une seule définition substantielle : le sentiment de culpabilité.
Pietro Castellitto a grandi parmi les acteurs, actrices, producteurs, scénaristes. En fait, il peut faire les films qu’il fait, non pas tant grâce à son talent, dont on sait que l’Italie regorge parmi ces derniers, mais parce qu’il est le fils de celui dont il est le fils. Dans ses films, il en parle lui-même métaphoriquement, en plaisante, a créé des comparaisons avec le Vietnam en parlant de cette Rome du Nord, cette grande, excessive, puissante et riche, avec laquelle il a suscité critiques et dérision, mais dont il continue vouloir nous livrer, sans faute, un portrait impitoyable, cynique, complet et sans filtre. Son cinéma est celui d’un cinéphile friand et quelque peu confus, à la fois Les Raiders Que Énée ils avaient en commun le défaut d’être trop chargés, évidemment dû à un excès d’amour de la part de leur créateur.
Une erreur classique de jeunesse, quand on n’a pas encore compris que c’est en supprimant et en lissant les coins que l’on atteint l’équilibre parfait. Pourtant, ces deux films ont également été une bouffée de fraîcheur et de nouveauté dans notre panorama, où, outre les titres dignes d’intérêt, il suffit de penser Il y a encore demain, Kidnappé, Cent dimanches, pour ne citer qu’eux, un cinéma comme le sien, à mi-chemin entre le comique, le grotesque, le tragique, manquait depuis très longtemps. Chez lui, chez Pietro Castellitto, il est inutile de nier qu’il existe un pouvoir, ou plutôt un pouvoir, pour citer son Énée, qui ne peut laisser indifférent, surtout parce qu’il est vrai, parce qu’il est authentique, même s’il est étrange, excessif et contradictoire, car cela vient de sa volonté de s’impliquer et de se mettre à nu sans compromis.
Pietro Castellitto se sait privilégié, mais il en souffre terriblement
Énée c’est l’histoire d’un fils de bourgeois, mécontent, riche mais plein de culpabilité, d’un garçon qui enseigne le tennis, travaille comme local, aime et déteste son environnement, lui-même et son ambition. Ni l’un ni l’autre Les Raiders il essayait de faire sauter la tombe de Nietzsche, le voilà qui se lance dans le trafic de drogue pour un patron qui a le regard bienveillant d’Adamo Dionisi, en compagnie d’un compagnon qui est un autre bourgeois de D’Annunzio comme lui, le pilote Valentino. Pietro Castellitto se sait privilégié, mais il en souffre terriblement, il sait que pour le meilleur ou pour le pire il lui sera très difficile de se débarrasser de l’étiquette recommandée, mais c’est cette lacération qu’il montre qui le rend intéressant. Pietro Castellitto déchire la famille, cette divinité cinématographique des autres, déchire Rome même si c’est sa ville, voire sa génération.
En fait Énée c’est avant tout ça : la vivisection d’un corps pourri, celui des vingt et trentenaires d’aujourd’hui, qui se disent tellement internationaux, inclusifs, égaux, tellement technologiques et cool, mais il nous montre leur âme superficielle, cynique, individualiste de manière toxique. Ils ne sont pas moins attachés au pouvoir et à l’argent que ne l’étaient leurs frères aînés ou leurs pères, bien au contraire. Son cinéma fait beaucoup de clins d’œil à Sorrentino, aux maîtres de notre drame bourgeois, mais ensuite aussi à Scorsese, De Palma, à la féroce comédie française de dernière génération, bref, c’est un minestrone. Un peu comme Rome elle-même, dont il nous a parlé aussi bien des familles intouchables très riches que des fascistes des campagnes pontines, du crime indigène et importé, des villageois enrichis et appauvris.
Il n’absout pas ses protagonistes mais il ne les condamne pas non plus complètement ; ce qui est sûr, c’est qu’il y a en lui une lacération qu’il exhibe, dans une sorte de psychanalyse, avec bien plus de candeur qu’on pourrait le penser. Mais cela ne veut pas dire qu’il renonce au narcissisme, cette divinité qui, comme on le sait, est typique de notre pays, où les acteurs se considèrent encore comme des surhommes et non comme des ouvriers comme ils l’ont appris au cours des vingt dernières années à Hollywood. Parmi toutes ces contradictions, cette recherche de l’excès, il est inutile de nier que Pietro Castellitto peut donner beaucoup à notre cinéma, paradoxalement à une condition : qu’on ne cesse de le critiquer, qu’on ne cesse de le surveiller. lui. Une reconnaissance universelle pour lui serait un véritable effondrement.