Pourquoi a-t-on inventé des monstres ? L’origine et la signification des vampires, zombies et autres créatures

Alexis Tremblay
Alexis Tremblay

Depuis des siècles, vampires, zombi Et spectres ils exercent un certain charmeimaginaire collectif: dans les légendes européennes par exemple, le vampire incarne la peur de l’inconnu et de l’altérité, tandis que dans d’autres cultures, comme celle haïtienne, le zombie représente la terreur de se perdre. Ces des êtres monstrueux proviennent de croyances Et symboles ancienssouvent lié à phénomènes naturels ou maladies peu connues. Les monstres, à travers leurs représentations et selon la culture de référence, fournissent une lentille puissante avec laquelle nous explorons peurs profondesla relation avec la mort et la décadence physique. De plus, leur signification est parfois liée au politiquele morale et l’organisation de société.

La naissance de la légende des vampires et la maladie derrière le mythe

La légende de vampireavec sa silhouette pâle et son aversion pour le soleil, trouve des racines profondes dansEurope de l’Estdans des pays comme l’Ukraine, la Hongrie et la Roumanie. Cependant, derrière le mythe du vampire se cachent aussi explications médicales. L’une des théories les plus fascinantes sur ce chiffre attribue son origine à la maladie rare du protoporphyrie érythropoïétique (PPE). La PPE est une maladie génétique caractérisée par une photosensibilitéqui peut provoquer de graves lésions cutanées si les personnes atteintes sont exposées au soleil. Le pâleur et la nécessité d’éviter le soleil, symptôme de cette maladie, a peut-être contribué à la construction du vampire comme une figure pâle et nocturne.

origine maladie des vampires

Comment est née la légende des zombies

Le chiffre de zombi a ses racines profondes dans religion et dans le culture haïtiennelié à Vaudou. Explique Michel-Rolph Trouillot que, dans la tradition vaudou, un zombie n’est pas simplement un mort-vivantmais une personne privée des siens volonté à travers des pratiques magiques, souvent sous son contrôle sorcier ou « bokor« . Le terme « zombie » vient du terme africain « nzambi« signifiant « esprit » ou « âme » dans plusieurs langues bantoues. Ce processus de «Zombification» reflète une métaphore puissante de esclavage et la perte de l’autonomie individuelle et constitue un moyen par lequel les communautés haïtiennes retraitent le traumatisme de l’esclavage et de la domination coloniale.

Selon Romero (1968), dans la culture européenne et américaine contemporaine, le zombie est devenu le symbole de décadence socialedu peur de l’apocalypse et de perte d’humanité face à des catastrophes mondiales, telles que des pandémies ou des crises environnementales. Ainsi, la figure du zombie incarne non seulement la terreur du retour des morts, mais aussi laanxiété face à l’avenir et la survie de la civilisation.

origine et signification des zombies

Le rôle des monstres dans la culture et la société

Les monstres, tels que les vampires, les zombies ou les fantômes, représentent souvent les tentatives des cultures de donner un visage à des peurs communes, liées à des événements naturels inconnus ou à des changements sociaux difficiles. Par exemple, le vampire est souvent associé à peur de la contagion et de la maladiealors qu’il zombi symbolise le perte d’humanité et d’identité. Nous avons toujours cru qu’une fois expliquée l’origine de certaines maladies ou événements naturels, ces chiffres avaient accompli leur tâche. Du point de vue de études humanistesCependant, ces figures « monstrueuses » ne doivent pas être considérées comme de simples fantasmes ou absurdités.

Les monstres remplissent une fonction cruciale dans le suivi des frontières entre ce qui est « humain » et ce qui ne l’est pas. Le philosophe Noël Carroll, dans son essai La philosophie de l’horreur (1990), suggère que les monstres sont des créatures qui nous amènent à remettre en questionidentité humaine: « Qu’est-ce qu’être humain ? Quelles sont les limites de notre moralité et de notre civilisation ?

Graeber et Wengrow, par exemple, nous aident à comprendre que ces mythes ne sont pas seulement des expressions de peur ou de superstition, mais un dispositif utile pour l’organisation sociale et politique des communautés. Les récits sur les esprits, en effet, ne reflètent pas seulement le pouvoir et la coercition exercés « de haut en bas » (ceux qui sont au pouvoir établissent ce qui est interdit et créent un mythe/monstre pour éloigner la communauté de ces comportements, attitudes, caractéristiques) , mais ils sont aussi l’expression d’une action à la fois consciente, créatrice et non hiérarchique.

Graeber et Wengrow nous expliquent combien de communautés du passé pouvaient, avec des méthodes de gestion « horizontales » (sans avoir besoin de vivre structurées en hiérarchies), créer ces histoires pour donner réponses collectives à la gestion des conflits ou des crises internes. Les croyances sur les monstres ou les esprits agités étaient donc un moyen de négocier ensemble un comportement moral, de décider collectivement de ce qui était bien ou mal, créant ainsi un système d’autorégulation sociale. Cette « morale horizontale » était flexible et adaptable et ne recourait pas à des structures autoritaires ou oppressives. Le mythe n’a pas été imposé, mais co-créé par la communauté pour maintenir une certaine éthique ou un certain ordre social.

Bibliographie

McClelland, Bruce A. Les tueurs et leurs vampires. Presse de l’Université du Michigan, 2006.

Dauphin, David. « Porphyrie et la légende des vampires ». Américain scientifique, 1985.

Davis, Wade. Le Serpent et l’Arc-en-ciel. Simon et Schuster, 1985.

Romero, George A. La Nuit des morts-vivants. 1968.

Carroll, Noël. La philosophie de l’horreur. Routledge, 1990.

Cohen, Jeffrey Jérôme. Théorie des monstres : culture de la lecture. Presses de l’Université du Minnesota, 1996.

Graeber, David et Wengrow, David. L’aube de tout : une nouvelle histoire de l’humanité. Farrar, Straus et Giroux, 2021.

Trouillot, Michel-Rolph. Faire taire le passé : pouvoir et production de l’histoire . Balise Press, 1995.