« L’arrêt de la vente de voitures essence et diesel à partir de 2035 n’est qu’une couverture. L’UE veut nous empêcher d’utiliser des voitures à moteur à combustion interne beaucoup plus tôt, en nous imposant la mise à la casse des véhicules obsolètes », c’est-à-dire ceux dont le « coût de réparation » dépasse la valeur marchande, soit parce que la voiture a manqué le contrôle technique national pendant deux ans, soit parce que le moteur ou la boîte de vitesses doivent être remplacés, soit parce que les freins et les éléments de direction sont trop usés ». Il a signalé ces derniers jours, l’eurodéputé de la Ligue, Isabella Tovaglieri. Des propos qui ont immédiatement fait le tour des réseaux sociaux, suscitant la polémique et ravivant l’accusation classique d’une « mauvaise » Europe qui veut s’en prendre aux citoyens au nom de l’environnementalisme (« encore une éco-folie », définit le parlementaire de la Ligue du Nord). Mais qu’est-ce qui est vrai » ?
Les règles
L’alarme lancée par Tovaglieri, il faut le dire immédiatement, n’est pas nouvelle : déjà ces derniers mois, sur divers comptes sociaux à travers le continent, dont beaucoup sont déjà connus pour diffuser de fausses nouvelles, des reconstitutions ont circulé sur le risque présumé d’enlèvements par des voitures les plus endommagées de l’UE. L’un des premiers fut un certain Peter Suède, dont poste sur X (anciennement Twitter), il a été visionné plus de 590 000 fois. Aujourd’hui comme hier, le doigt pointe une proposition de la Commission européenne datant de juillet dernier, le « Règlement pour la gestion des véhicules hors d’usage ».
Que dit cette proposition ? Il convient de noter qu’il existe déjà aujourd’hui des lois sur le sujet, en vigueur depuis vingt ans, les directives sur les véhicules hors d’usage et sur la réutilisation, la recyclabilité et la valorisation des voitures et pièces automobiles. Bruxelles souhaite mettre à jour ces règles : « Chaque année, plus de six millions de véhicules en Europe arrivent en fin de vie. Une gestion inadéquate des véhicules en fin de vie entraîne une perte de valeur et une pollution », explique-t-il dans un communiqué.
Obligations pour les producteurs
La proposition, en réalité, s’adresse principalement aux constructeurs, et non aux propriétaires de voitures : la Commission veut introduire des obligations dans la phase de construction (comme le seuil minimum de 25 % de plastique recyclé sur le total utilisé) qui permettraient de produire plus des véhicules « verts » et recyclables. Ce n’est pas un hasard si l’ACEA, le puissant lobby des constructeurs automobiles, a soulevé les premières inquiétudes, craignant les impacts sur leurs budgets résultant d’une utilisation accrue de matériaux recyclés.
Mise au rebut forcée ?
Pour ceux qui possèdent une voiture, les nouvelles mesures ne concernent pas tant la propriété elle-même que ce qui se passe lorsqu’ils souhaitent vendre leur véhicule. Dans le règlement, « rien ne peut empêcher les propriétaires de tout type de voiture, quel que soit son état, de tenter de la réparer ou de la faire réparer », précise le porte-parole de la Commission européenne des transports, Adalbert Jahnz. « Ce n’est que dans le cas de la vente d’une voiture – ajoute-t-il – que, dans ce règlement, il y a des règles qui permettront aux autorités de déterminer s’il s’agit effectivement d’une voiture (vendable, ndlr) ou d’un véhicule qui a atteint la fin de sa vie », explique.
Autrement dit, nous pouvons continuer à conserver notre ancienne voiture aussi longtemps que nous le souhaitons. Mais si nous décidons de le vendre, les nouvelles règles entrent en vigueur. Cette mesure, explique encore Jahnz, n’a pas pour objectif d’imposer de nouvelles obligations aux citoyens, mais de « mettre fin à un certain type de fraude: il existe des véhicules qui sont à la ferraille et qui sont exportés de l’UE et vendus comme de véritables voitures d’occasion », même si en réalité ils ne peuvent en aucun cas bouger ».
Les critères pour savoir si la voiture est « en panne »
Pour vendre la voiture, une série de critères doivent donc être respectés. Le critère général est que la voiture soit réparable : si elle ne l’est pas, elle devient un « véhicule en fin de vie » et ne peut être vendue comme voiture d’occasion. Concrètement, Bruxelles écrit qu’un « véhicule est techniquement irréparable s’il répond à au moins un des critères suivants :
- a été brisé en morceaux ou démembré ;
- a été soudé ou fermé avec de la mousse isolante ;
- il a été complètement brûlé au point que le compartiment moteur ou l’habitacle a été détruit ;
- il était immergé dans l’eau jusqu’au tableau de bord ;
- au moins un des composants suivants du véhicule ne peut pas être réparé ou remplacé :
- les composants d’adhérence au sol (tels que les pneus et les roues), la suspension, la direction, les freins et les commandes associées ;
- joints et attaches de siège;
- airbags, prétensionneurs, ceintures de sécurité et leurs composants périphériques ;
- la carcasse et le châssis du véhicule ;
- les composants de structure et de sécurité présentent des défauts techniques irréversibles et non remplaçables, tels que le vieillissement du métal, de nombreuses fissures dans les couches de peinture ou une corrosion par perforation excessive ;
- la réparation d’un véhicule nécessite le remplacement du moteur, de la boîte de vitesses, du châssis ou de l’ensemble châssis, entraînant la perte de l’identité d’origine du véhicule.
En outre, « le véhicule n’est pas économiquement réparable si sa valeur marchande est inférieure au coût des réparations nécessaires pour le remettre dans l’Union dans un état technique suffisant pour obtenir un certificat de conformité dans l’État membre où il a été immatriculé avant la réparation ». » .
Enfin, le « véhicule peut être considéré comme techniquement irréparable si :
- il a été immergé dans l’eau jusqu’au tableau de bord avec des dommages au moteur ou au système électrique ;
- les portes ne sont pas sécurisées ;
- fuite de carburant ou de ses vapeurs avec risque d’incendie et d’explosion ;
- une fuite s’est produite dans le système de gaz liquéfié, ce qui présente un risque d’incendie et d’explosion ;
- fuites de fluides de fonctionnement (carburant, liquide de frein, antigel, acide de batterie, liquide de refroidissement) avec risque de pollution des eaux ; ou
- les freins et les composants de direction sont excessivement usés.
Si l’une des conditions ci-dessus existe, une évaluation technique du véhicule est effectuée pour déterminer si son état technique est suffisant pour obtenir un certificat de conformité dans l’État membre où le véhicule était immatriculé avant la réparation », conclut Bruxelles.